A Brest, on flotte, on tourne, on se lève, on plane.

Coupée en deux : c’est l’héritage de Brest, qui depuis trois siècles n’a cessé de vouloir recoller ses deux moitiés. D’un côté « Brest – même » comme on l’appelait, de l’autre le quartier de Recouvrance, au milieu la rivière Penfeld et la zone de l’Arsenal, enclave privée militaire interdite aux civils. Si on précise que le lit de la Penfeld est encaissé entre deux rives abruptes, le tableau est complet.

Aux 17°-19° siècles une seule solution pour passer d’un côté à l’autre : des barques – traversée précaire, risquée et payante. En 1856, on installe un pont flottant, le pont Gueydon, appelé le P’tit pont. En 1861 une merveille technologique est construite : un pont tournant, appelé Pont Impérial, puis Pont National et familièrement Grand Pont. En 1909, on ajoute au fond de la Penfeld un pont transbordeur, principalement pour les ouvriers de l’Arsenal. En 1927 on construit le pont de Kervallon, un pont levant, en amont de la Penfeld, toujours réservé à l’Arsenal.

1942 : bombardements, Brest détruite, les ponts avec. Tous ? Non, un seul a résisté, Kervallon est debout, il servira exceptionnellement aux civils.

Et on recommence !

1946 : on reconstruit le P’tit pont flottant en métal, vous savez, le pont Gueydon.

1951, inauguration du pont de l’Harteloire, dit aussi pont de l’hôpital, en amont de la Penfeld.

1954 : le nouveau Grand Pont est inauguré : le pont levant de Recouvrance.

Compliquées ces histoires de ponts, entre leur affectation militaire / civile, leur destruction / reconstruction, leurs noms officiels et leurs surnoms ; certains ont une documentation abondante, d’autres ne sont que mentionnés. Mes recherches, principalement sur internet je l’avoue, m’ont perdue. D’autant plus que j’ai d’abord confondu rive droite et rive gauche, amont et aval, sans compter quelques plans orientés au sud et non au nord. Ajoutez à cela les imprécisions de certains sites, les ponts oubliés de la mémoire collective, et les erreurs souvent.

Mais revenons au pont de Recouvrance : symbole du renouveau de Brest. Il est vanté comme le plus haut pont levant d’Europe, les articles techniques abondent à son sujet. On se presse pour voir le grand tablier métallique se lever au passage des navires en 150 secondes seulement. Ce devait être un sacré spectacle de s’y balader sur son petit vélo, fanion au vent, dominant la rivière, les bateaux militaires, le Brest tout neuf émergeant des ruines et des baraquements.

En 2011, le tramway passera sur le pont de Recouvrance comme il l’avait fait sur l’ancien pont National un siècle auparavant. Et en 2016, nouveau franchissement de la Penfeld avec le téléphérique. Mais les quais sont toujours inaccessibles aux brestois, sauf les jours de fêtes maritimes, le téléphérique est régulièrement en panne, le pont levant souvent…. levé, interrompant la circulation pendant plusieurs heures à chaque fois. La Penfeld reste encore une frontière au cœur même de Brest.

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